Pourquoi les personnes trans changent de prénom
Et pourquoi c’est si important de respecter ce choix
Le prénom, c’est plus qu’un mot
Pour beaucoup, un prénom est un héritage. Un geste tendre posé sur un berceau, un clin d’œil à une grand-mère, un prénom aimé, transmis, parfois choisi avec soin… ou un peu à la va-vite.
Mais quoi qu’il en soit, c’est souvent le premier mot que le monde pose sur nous, et celui qu’il utilise toute notre vie pour nous désigner.
Seulement voilà : pour les personnes trans, ce prénom peut être un costume trop serré, une dissonance, une blessure. Il arrive même qu’il soit un reflet fidèle… d’un mensonge social.
Pourquoi changer de prénom ?
Changer de prénom, pour une personne trans, ce n’est pas une fantaisie, ni un caprice narcissique. C’est une manière de s’aligner intérieurement et extérieurement, de faire coïncider ce que l’on ressent profondément avec la manière dont on est appelé.
Voici quelques raisons fréquentes :
- Parce que le prénom de naissance évoque un genre assigné qui n’est pas (ou plus) le sien.
- Parce que ce prénom peut rappeler des périodes de mal-être profond, de souffrance, voire de violence ou de rejet.
- Parce que choisir son prénom, c’est choisir son reflet, et parfois réparer une partie de soi.
- Parce que c’est un droit fondamental de se nommer soi-même.
Le dead name, c’est quoi ?
Le dead name, c’est ce prénom de naissance qu’on n’utilise plus — justement parce qu’il ne correspond plus à la personne qu’on est aujourd’hui.
Ce mot peut paraître fort : dead, « mort ». Mais il traduit une réalité vécue par beaucoup de personnes trans : ce prénom est associé à une identité ancienne, souvent douloureuse, voire à un moment de la vie qu’on essaie de laisser derrière soi pour survivre.
Utiliser le dead name, même involontairement, peut blesser très profondément.
Et non, ce n’est pas “du détail”. Ce n’est pas “juste un prénom”. C’est comme rappeler à une personne tout ce qu’elle tente de reconstruire chaque jour.
“Je voulais bien faire…” : les maladresses bienveillantes
Certaines personnes — souvent pleines de bonne volonté — peuvent commettre cette erreur :
“Je l’ai toujours connu·e sous ce prénom, ça me fait bizarre de dire autrement.”
“Mais tu resteras toujours ‘dead name’ pour moi.”
“C’est difficile à changer, tu comprends ?”
“C’est dur pour moi de m’y faire.”
Oui, sûrement. Mais imagine ce que c’est pour la personne qui vit avec un prénom qui n’est pas le sien depuis des années…
Oui, c’est difficile. Mais imagine si, chaque fois qu’on t’appelait, on t’appelait par un nom qui ne t’appartient plus. Par un nom qui nie ton chemin, ton courage, ton identité, ton combat. Ce n’est pas anodin. Ce n’est jamais anodin.
Choisir de respecter le prénom choisi, ce n’est pas oublier la personne qu’on a connue :
c’est au contraire l’aimer comme elle est, ici, maintenant.
Quelques idées reçues… et la réalité
“C’est juste un prénom.”
Non. C’est une affirmation d’identité. Un prénom peut vous faire sentir vivant… ou vous effacer.
“Tu renies ton passé.”
Pas du tout. On avance. On ne jette pas les photos anciennes : on tourne juste la page.
“C’est une phase.”
Non plus. C’est une prise de conscience. Une phase, c’est transitoire. Ici, on parle de vérité.
“Mais tu as été élevé comme un garçon/une fille !”
Peut-être, mais on peut avoir été élevé·e dans un rôle qui ne nous correspondait pas.
Le pouvoir de choisir son prénom
Et si on renversait un peu la perspective ?
Choisir son prénom, ce n’est pas prétentieux. C’est un acte profondément intime et courageux.
C’est affirmer :
“Je mérite un prénom dans lequel je me reconnais.”
“Je suis en train de me construire, pas de renier.”
“Je suis la même personne, mais je m’autorise enfin à être moi-même.”
Il y a quelque chose de très beau là-dedans.
Une forme d’autodétermination poétique. Comme un baptême de soi-même, par soi-même.
Exemples connus
- Elliot Page, acteur trans connu pour Juno ou The Umbrella Academy, a rendu son prénom public après sa transition, et insiste souvent sur l’importance de respecter cette identité.
- Andreja Pejić, mannequin trans, a parlé de son parcours de renommée, de malentendus, et du besoin viscéral de vivre sous son prénom choisi.
- De nombreuses personnes trans anonymes, sur YouTube, TikTok, ou dans des témoignages écrits, racontent ce moment émouvant où on les appelle enfin par leur prénom — le bon.
Témoignages / extraits de personnes trans au sujet du changement de prénom
1. « Je n’ai pas choisi mon prénom de naissance. J’ai juste attendu assez longtemps pour me choisir moi-même. »
2. « Mon dead name, c’est comme un vieux costume qu’on me recolle alors qu’il me serre, me gratte, et m’étouffe. »
3. « Le jour où mon père m’a appelée par mon vrai prénom, sans se tromper, j’ai pleuré. Pas parce que c’était parfait, mais parce que c’était possible. »
4. « On me dit souvent “je t’ai connue comme ça”. Oui, moi aussi. Et c’est bien pour ça que j’ai changé. »
5. « J’ai choisi un prénom qui ressemble à ma voix intérieure. C’est la première fois qu’on s’entend. »
6. « Ce n’est pas un caprice. C’est de la survie. Et aussi, de la poésie. »
Pour les proches : comment bien réagir ?
- Respecter immédiatement le prénom choisi, même si c’est difficile au début.
- S’excuser simplement en cas de maladresse : “Pardon, je me suis trompé·e.” Pas besoin d’en faire des tonnes.
- Ne pas poser trop de questions si la personne ne les a pas proposées. Le prénom, c’est intime.
- Ne pas utiliser l’ancien prénom, même avec des “vieux amis”. Ça reste un manque de respect, même en “off”.
- S’entraîner si besoin. Note-le, répète-le, et adapte ton regard au présent.
La bienveillance, ce n’est pas un effort. C’est un choix.
Changer de prénom, c’est un geste vital, souvent au cœur d’un long processus d’acceptation, de coming-out, de transition. Ce n’est pas un luxe. Ce n’est pas un caprice. C’est un besoin. Un droit. Un acte d’amour envers soi-même.
Et le rôle des autres, ce n’est pas de juger. C’est d’accueillir. D’accompagner, ou, à défaut, de ne pas nuire.

Ceux qui me connaissent l’ont sans doute déjà probablement vue quelque part.
Au centre de l’image, on reconnaît Millie Bobby Brown, une actrice brillante qui m’inspire énormément, révélée dans Stranger Things.
Elle incarne ici Enola Holmes, un personnage intelligent, audacieuse, indépendante, farouchement libre… et petite sœur du célèbre détective Sherlock Holmes.
Et c’est elle, Enola, qui m’a inspirée bien plus que je ne l’aurais imaginé.
J’ai moi-même une petite sœur qui m’apprécie énormément — et c’est très touchant…
Peut-être qu’au fond, j’ai toujours rêvé, moi aussi, d’être sa petite sœur. À présent elle m’appelle grande sœur et je vous avoue que ça me fait fondre…
Parenthèse personnelle – « Pourquoi Enola ? »
Je n’ai jamais vraiment aimé mon prénom de naissance. Comme beaucoup, sans doute.
Dans mon entourage, on utilisait plutôt sa version courte — ce diminutif informel qui permettait de le tolérer, sans l’habiter.
Une amie m’a un jour glissé, avec douceur, que j’avais de la “chance” : mon prénom de naissance aurait pu être féminisé. Peut-être. Mais à quoi bon, si c’était pour garder le même surnom, le même masque ? Je sentais bien que je n’étais pas celle que le monde appelait.
Alors j’ai exploré. J’ai testé “Laura” dans un cercle d’amis proches. C’était joli, doux. Mais ce n’était pas encore moi. Et puis un jour, Enola m’est apparu.
Il y avait dans ce prénom quelque chose d’insaisissable. Une forme d’intimité silencieuse, presque solitaire, mais jamais triste.
Enola, comme Enola Holmes, cette jeune détective brillante et farouchement libre.
Enola, comme « alone » à l’envers, une solitude qu’on apprivoise, choisie.
Et puis ce prénom est aussi lié au chrysanthème, une fleur de passage, de mémoire, et de renouveau.
Je l’ai testé, dans le même cercle restreint. Et il a résonné.
Depuis la fin de l’année dernière, je l’utilise de plus en plus : sur Internet, pour mes commandes, sur mon blog, ma nouvelle page Facebook, avec ma psy, ma doc, mon esthéticienne…
Il y a maintenant des gens qui ne me connaissent que sous ce prénom. Et c’est peut-être ce qu’il y a de plus doux : quand le regard des autres épouse enfin ce que l’on sait de soi.
Mon dead name, je ne le mentionne que rarement. Peut-être pour le garder en mémoire, ou dans quelques documents.
Et peut-être aussi un jour, je porterai symboliquement comme second prénom le prénom de ma fille, comme un lien subtil, une continuité.
En ce moment, j’ai parfois l’impression d’être deux personnes à la fois — dont une qui s’efface peu à peu, comme une silhouette floue dans le miroir. Je suis prête à ce que les gens m’appellent enfin comme je me ressens. Et je crois qu’ils s’y habitueront. Ce n’est pas si terrible, finalement… si ?
Et puis, à celles et ceux qui me côtoient : n’ayez pas peur de venir me parler.
Je sais que parfois, on a peur de mal faire, de se tromper, de blesser sans le vouloir.
Mais un simple bonjour sincère vaut mieux que le silence gêné. Et même si vous vous trompez, je ne vous en voudrai jamais.
Mon ancien prénom a circulé, il a laissé des traces, parfois bien au-delà de ce que j’aurais imaginé. Il faudra du temps pour qu’il s’efface doucement, non pas que je veuille le renier,
mais juste le laisser se faire plus discret, comme une page qu’on ne relit plus aussi souvent.
Ce que je vous demande, ce n’est pas la perfection. C’est juste un peu de présence, un peu de respect, et, si possible, un peu d’élan vers ce que je suis devenue.
Le changement de prénom à l’état civil viendra plus tard. C’est plus administratif, plus laborieux. Changer tous ses documents administratifs… un véritable parcours du combattant.
Mais ce n’est rien à côté de ce que ça représente : la sensation enfin d’exister à son propre nom.
— Enola 😘
Parenthèse rapide sur les démarches administratives
Changer de prénom à l’état civil, en Belgique comme ailleurs, reste une procédure administrative à plusieurs étapes, souvent longue et parfois émotionnellement éprouvante.
Changer de prénom est déjà un petit parcours : il faut faire une demande à l’état civil, avec des justificatifs. Mais changer de mention de sexe, c’est encore plus complexe : cela implique le changement du numéro de registre national, et donc de tous les documents officiels (carte d’identité, permis, assurance, dossiers médicaux, etc.), ce qui demande du temps, de la patience… et parfois de l’aide.
Guide belge clair et concis
- Genre et transition : ce que vous devez savoir
Rédigé par Genres Pluriels (BE) – pour comprendre les démarches administratives et sociales : https://www.genrespluriels.be
